Psychologie

Comment détecter une personne qui se victimise ?

La victimisation peut devenir un piège.

Comment détecter une personne qui se victimise ?

Nous avons tous, à un moment donné, joué le rôle de victimes pour atteindre un objectif.
Mais transformer la victimisation en habitude, comme stratégie passive, est un piège.

Quand une personne assume le rôle de victime, parce qu’elle ne peut pas faire face à la situation qui la dérange ou parce qu’elle ne comprend pas le mal qui l’affecte, elle cherche un des deux objectifs :

  1. Inhiber l’agresseur, c’est-à-dire que la victime se montre vaincue, en position d’infériorité de conditions.
  2. Parvenir à l’empathie générale, parce qu’une personne “blessée”, émotionnellement parlant, engendre la solidarité autour d’elle.

Cependant, toujours assumer le rôle de victime est contre-productif parce qu’il arrive un moment où les autres n’avalent pas l’histoire et ne l’écoutent plus, d’autre part, la position de victime a été si chronique que l’on pense que la personne est incapable de résoudre ses problèmes ou de faire face à son agresseur.

Comment agit une personne qui se victimise ?

L‘auto-victimisation est un processus psychique ou l’individu se positionne dans une place de victime. Victime de son entourage, victime de sa hiérarchie, de ses collègues… Elle souffre comme jamais auparavant n’a souffert dans ce monde. En effet, ses problèmes sont plus graves et plus urgents que ceux des autres. De plus :

  • Elle veut attirer l’attention. Au lieu de chercher une aide efficace ou une empathie légitime, la victime cherche à éveiller la pitié des autres et, dans cette mesure, à confirmer qu’elle ne peut résoudre les problèmes elle-même. Ce jeu de la victime a pu être renforcé dès l’enfance lorsque l’enfant est surprotégé par les adultes et grandit ainsi avec la conviction qu’elle n’a pas de ressources internes pour réagir aux situations qui lui font du mal.
  • Elle n’assume pas ses responsabilités. Ce point a beaucoup à voir avec le précédent, car la victime élude consciemment son rôle face aux conflits. Elle évite les problèmes et préfère rester dans le rôle de la victime.
  • Elle accuse les autres de ses malheurs. Celle qui en est victime est incapable de voir objectivement les situations de conflit parce qu’elle croit que le monde entier est contre elle. Personne ne pense comme elle, personne n’est capable de se mettre à sa place, alors que la réalité est qu’elle change elle-même la réalité en sa faveur pour se placer confortablement dans le rôle de la victime.
  • Elle se plaint constamment. C’est son activité préférée, car c’est la meilleure dynamique pour se justifier en tant que victime. Elle exagère ce qui lui fait mal, ce qui la dérange, mais elle essaie de faire croire qu’elle a fait tout son possible parce que les choses changent, alors qu’au fond, elle sait qu’elle n’est pas forte et ne fait aucun effort pour changer son attitude face à ce qu’elle n’aime pas.

Avoir conscience que l’on a été victime permet de sortir du statut de victime et de l’impuissance qui en découle. Mais spéculer sur le futur en posant comme hypothèse que l’on va être victime du système, d’un individu, ou expliquer toutes les conséquences négatives d’un quotidien par des variables extérieures est un processus handicapant et névrotique, vous posant en victime continuelle et induisant dans votre regard sur le monde que vous êtes impuissant face à ce qui s’y déroule. Il y a une différence entre un vrai statut de victime et celui qui se sent victime continuelle du système. La première chose à changer c’est votre regard sur le monde.

Pourquoi la victimisation est un piège ?

La victime renforce sa faible estime de soi et son insécurité, et c’est pourquoi il lui est plus facile de porter les écriteaux “je suis une malheureuse” ou “personne ne me comprend”. Alors, même si elle accomplit quelque chose de bien par ses propres efforts ou s’il lui arrive quelque chose d’important et de positif dans sa vie, elle ne l’appréciera pas et ne l’appréciera pas parce qu’elle est prise dans le piège du “je suis une ratée et quelque chose de mauvais se passera sûrement plus tard”.

La plupart des individus ayant ce positionnement psychique ont souvent un manque de confiance en eux, une perte d’estime à un moment ou à un autre de leur parcours. Ils se sentent souvent coupables de leurs échecs et mettent en place des explications causales extérieures à eux-mêmes afin d’échapper au sentiment de culpabilité face à l’échec de leur propre vie. Souvent, ils ont construit leur identité sur des failles : perte d’êtres chers, traumatismes, violences environnementales, et n’ont pas donné de sens à ces évènements vécus comme douloureux, à part « la malchance », « l’impuissance que la vie procure » ou autre.

Un autre profil existe également : des individus souvent en manque de confiance en leurs propres capacités, souvent très dociles dans leurs rapports au monde. Là, la faille repose sur la peur du rejet ou d’être vu comme un mauvais élément, notamment dans le cadre du travail. Identitairement, ils sont sensibles, très dans l’affect et n’arrivent pas à remettre leurs agissements en question ; pour eux, leur  docilité ou leur  gentillesse sont totalement issus de leur fragilité.

Se sentir victime de quelqu’un ou de quelque chose en revient à se mettre en lien avec la cause et à s’y structurer. Si vous pensez que l’on vous empêchera d’avancer, vous allez agir en le prenant en compte dans vos processus décisionnels, le lien sera donc là. Si vous spéculez que l’on n’aimera pas votre compte-rendu car l’on ne vous aime pas, votre ton de voix ou vos attitudes physiques seront empreints de cette peur implicite et votre spontanéité en sera entachée. Un lien se crée toujours lorsque l’on pense à une cause avant que la conséquence n’ait eu lieu. Toute personne qui se sent « victime de » se met en en lien « avec ».

Comment sortir du cercle vicieux de la victimisation ?

Celui qui assume le rôle de victime depuis de nombreuses années devra faire un grand effort pour sortir de là et trouver de nouveaux points de vue. Dans ce travail, il est très utile d’avoir l’aide d’un psychothérapeute et il est également important que les personnes qui l’entourent changent de position de manière radicale pour ne plus renforcer la victimisation.

  1. Objectivité. La personne doit apprendre à faire une analyse objective de la réalité qui l’entoure : tout est-il aussi mauvais que je veux le voir ou y a-t-il des points positifs ? Est-ce que je me plains de vice ou y a-t-il vraiment des choses pour lesquelles il ne faut pas se plaindre ?
  2. Isoler chaque situation pour établir les responsabilités. Les victimes ont l’habitude de sortir les problèmes de leur contexte et ont du mal à comprendre que dans beaucoup d’entre eux aussi, elles ont une responsabilité à assumer. Dans quelle mesure est-ce à moi de changer cette situation? S’il y a quelque chose que je ne peux pas changer, comment puis-je avoir une attitude différente de la plainte ?
  3. Arrêter toutes les plaintes. Si, pour une journée, la victime essaie de ne pas se plaindre de tout, elle remarquera que sa souffrance n’est pas aussi grande qu’elle l’imaginait. Dans la plupart des cas, laisser couler les situations sans porter de jugement de valeur est une bonne idée pour comprendre les autres et créer des relations constructives.
  4. Prendre les critiques comme une partie de la vie. Nous ne pouvons pas plaire à tout le monde et nous ne pouvons pas prétendre que les relations humaines sont parfaites. Si quelqu’un me critique, au lieu de sauter sur la défensive, je pourrais demander à cette personne ce qu’elle veut dire exactement et pourquoi elle pense que je n’ai pas bien fait les choses. Le dialogue pourrait ouvrir la porte à de nouveaux points de vue, au-delà de la sensibilité et de la plainte constantes.

Que puis-je faire si je vis avec une victime ?

Lui faire comprendre qu’elle compte sur notre empathie et notre solidarité, mais que nous ne pouvons pas résoudre les problèmes pour lui ou pour elle. Nous ne sommes plus des enfants et nous n’avons plus de parents surprotecteurs qui viennent nous défendre ; nous sommes nous-mêmes les maîtres de notre destin et la personne qui vit avec une personne habituée à se plaindre de tout doit faire son propre exercice de s’éloigner quand elle voit que l’autre prend une position passive. La victime comprendra peu à peu qu’elle doit prendre en main sa propre vie.

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

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