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Pourquoi Océane BOURDIN c’est suicidé ?

Violé par son maître de stage, puis son confident quelques jours après ...

Après avoir porté plainte pour viol contre son camarade, Océane, étudiante de 21 ans, se suicide.

Le 10 février 2022, Océane Bourdin, 21 ans, avait passé la soirée avec un camarade dans un bar de Beaune en Côte-d’Or.

Le jeune homme était devenu son confident depuis qu’elle avait subi une agression sexuelle en janvier dernier, commise par son maître de stage, un patron du bar à vins qui l’employait.
Durant la nuit, les deux étudiants ont bu de l’alcool et sniffé de la cocaïne avant de rentrer chez Océane.

« Le déroulement de la soirée a commencé à devenir flou (…) je suis tombée dans les vapes » a-t-elle expliqué aux policiers. Quand Océane s’est réveillé, son ami était en train de la violer, a-t-elle affirmé. Elle l’a supplié d’arrêter avant de retomber inconsciente a-t-elle poursuivi.

« Je me suis réveillée plusieurs fois mais je ne pouvais pas bouger, c’est comme si j’étais prisonnière de mon corps. »

Après cette agression, Océane a sombré dans la dépression, les crises de boulimie, elle a tenté de mettre fin à ses jours à deux reprises et a enchaîné les périodes d’internement en hôpital psychiatrique. Le 4 juin dernier, un mois après avoir porté plainte pour viol, elle a profité que ses parents s’absentent de la maison, pour se suicider en ingérant une importante dose de médicaments dans sa chambre. Ses parents ont dénoncé une enquête restée au point mort, ce qui a « anéanti » leur fille. Le procureur de Besançon se défend de tout laxisme.

« Si l’enquête était allée plus vite, on aurait pu éviter son suicide. » s’indigne Yvan Bourdin, le père d’Océane.

Ce jeudi, lors d’une conférence de presse, le procureur de la République de Besançon a réagi aux accusations de la famille d’Océane affirmant que le parquet avance au rythme de la réception des pièces récoltées lors des investigations. Il a fait notamment référence à la mèche de cheveux prélevée sur la jeune femme. Après plus de trois mois d’attente, le rapport toxicologique n’a révélé aucune trace de soumission chimique.

Le magistrat a justifié ce délai en raison de la complexité des analyses.

Océane s’est donnée la mort le 4 juin 2022 à Valdahon, dans le Doubs. Elle avait dénoncé un viol mais aussi une autre agression sexuelle qu’elle avait subi quelques mois plus tôt. Ses parents prennent la parole et réclament la justice.

L’histoire d’Océane est de celle qui ne peuvent rester dans l’ombre, tant les obstacles qu’elle avait à surmonter étaient grands. Cette jeune femme de 21 ans, originaire de Besançon, s’est donnée la mort le 4 juin 2022, après avoir dénoncé un viol mais aussi une autre agression sexuelle subi quelques mois plus tôt. Elle a ingéré une cinquantaine de pilules médicamenteuses alors que ses parents, chez qui elle était retournée vivre en raison de son état psychologique fragile, avaient quitté pour la soirée le domicile familial. Son histoire nous est comptée par ses parents Yvan et Sandra, déterminés à obtenir des réponses malgré la peine qui les inonde.

Son père nous raconte en détails l’histoire d’Océane, les deux plaintes qu’elle a déposées pour viols et qui sont restées lettres mortes, la plongeant dans un état dépressif intense. « Océane a subi plusieurs traumatismes. Un premier en 2018 à un Nouvel An. Quelques années plus tard, elle a été abusée par son patron à Beaune, ville où elle était étudiante. Elle travaillait dans un bar. Ensuite, elle s’est confiée sur son histoire à un camarade de classe, qui la draguait depuis le début de l’année. C’est devenu son confident et un soir, il en profité pour lui mettre de la drogue dans son verre et il l’a violée » nous explique le père de famille après avoir posté un message sur les réseaux sociaux, dans l’espoir de voir la justice s’emparer de l’affaire.

Une véritable descente aux enfers

« Le 10 février 2022, notre fille bisontine de 21 ans, étudiante à Beaune se fait droguer et violer à plusieurs reprises dans son appartement à Beaune par un camarade de classe qu’elle pensait être son ami et son confident » peut-on lire, dans un long message détaillant le cauchemar dans lequel a plongé la jeune femme qui était étudiante en licence pour devenir sommelière.

« Elle nous a raconté plusieurs jours après ce qu’il s’était passé. Elle nous a dit : ‘Je ne pouvais plus bouger les jambes, les bras, je le suppliais d’arrêter' ». L’étudiante demande à ses parents de venir la chercher à Beaune, où elle vivait dans son propre appartement, expliquant qu’elle souhaitait quitter la ville immédiatement.

Océane sombre ensuite dans une profonde dépression, ne sort plus de son lit, et vit « une véritable descente aux enfers ». « Nous lui avons dit d’aller porter plainte tout de suite. Elle nous a répondu qu’elle était morte de l’intérieur et qu’elle se suiciderait si elle allait raconter ce qui lui était arrivé ». Elle tente de mettre fin à ses jours deux fois. La jeune femme est suivie par plusieurs professionnels de la psychiatrie, se rend deux fois aux urgences psychiatriques et est même internée 4 semaines à l’hôpital.

« Début mai elle allait mieux. Elle nous a dit : ‘Papa, maman vous allez être contents, je suis prête à aller porter plainte’” se rappelle Yvan.
Océane, lors de ses 20 ans.

« Je suis morte depuis le 10 février, vous n’auriez rien pu faire pour moi »

Océane porte plainte le 16 mai 2022, à 15h, au commissariat de la gare d’eau à Besançon, comme le stipule le dépôt de plainte que nous avons pu consulter. La jeune femme est alors persuadée que son agresseur l’a droguée à son insu, en plus de lui avoir proposé de consommer de la cocaïne, chose qu’elle a accepté pour la première fois de sa vie, après avoir consommé beaucoup d’alcool. « Le fait que j’ai été paralysée, que je ne puisse pas bouger. C’était la première fois de ma vie que j’avais cette réaction en ayant bu de l’alcool » explique-t-elle au brigadier. Elle ajoute dans sa plainte : « Par la suite, il n’a cessé de m’adresser des messages (ndlr, par le réseau social Snapchat) pour me dire qu’il était désolé, qu’il ferait tout pour se faire pardonner ».

« Ce rendez-vous l’a replongée dans une grosse dépression car elle a dû raconter sur 6 pages la nuit de son calvaire. On lui a expliqué que les résultats des analyses de ses cheveux prendraient 6 mois et qu’il y avait peu de chance d’avoir des résultats surtout qu’elle avait fait une couleur entre-temps » détaille le père de famille, précisant que le policier qui l’a reçu a été à l’écoute.

« On lui a laissé penser que l’affaire avait des chances d’être classée et que c’était parole contre parole. Elle ne l’a pas supporté ».

Océane se suicide le 4 juin au domicile de ses parents, alors que sa jeune sœur de 14 ans se trouve dans une pièce de la maison. Elle ne laisse aucune lettre à sa famille, malgré plusieurs recherches. Un message est retrouvé sur un bout de papier lors de l’analyse du corps.

« On est tombés des nues avec ma femme. Elle avait écrit. ‘Je suis morte depuis le 10 février, vous n’auriez rien pu faire pour moi.’”

Briser le silence pour que justice soit faite

Pourquoi Sandra et Yvan décident-ils de prendre la parole publiquement quelques mois après le décès de leur fille aînée ?

« Ma fille est morte et ne pourra plus se défendre, mais on veut reprendre le flambeau et on veut que justice soit faite » nous explique Yvan, qui passe des heures au téléphone depuis que son appel à l’aide sur les réseaux sociaux a été publié et largement partagé le 29 août, sur une page dédiée aux appels à témoin à Besançon. Le reste du temps, il avoue être déboussolé.

Selon les informations de la famille, l’enquête est au point mort et les analyses des cheveux d’Océane n’ont pas encore été livrées. Le violeur présumé de la jeune femme est en liberté et n’a pas été auditionné par la police, nous précise Yvan pour qui cette information est « insupportable ». « Ils savent son nom, son prénom, son portable et où il habite » s’offusque-t-il.

« Il y a tellement d’affaires comme ça où il n’y a rien ensuite… La perte est déjà compliquée à gérer et il faut gérer la justice en plus derrière » ajoute Sandra, la maman.

On a ce deuil à faire, et l’enquête est au stade zéro. Ça nous tue. On a aucune nouvelle, aucune nouvelle. On pète un plomb.
Yvan, père d’Océane

Il tient à rappeler qui était sa fille, une personne profondément gentille, travailleuse, attentionnée et aidante pour ses deux sœurs et son petit frère mais aussi pour les gens de manière générale. « Elle donnait à manger aux SDF, elle s’occupait des animaux de la SPA… On a même découvert qu’elle faisait un don tous les mois à Médecins du monde, alors qu’elle ne gagnait que 800 euros » dit Yvan.

« Je pense qu’on en a besoin pour que ça avance, pour faire notre deuil. Et on sait que c’est ce qu’aurait voulu Océane. Elle ne supportait pas l’injustice » ajoute Sandra. Et de lâcher : « On ne veut pas que ce soit impuni. On veut que ça serve à quelque chose. Nous, on a encore deux autres filles. On se dit qu’on ne sait pas ce qu’il va leur arriver. Il vaut mieux naître garçon malheureusement… »

En 2018, 94 000 femmes majeures déclaraient avoir été victimes de viols et/ou de tentatives de viol, selon l’observatoire des violences faites aux femmes. « Une amie spécialisée dans ces questions nous a dit que seulement 1% des plaintes aboutissaient à des condamnations », se désole Yvan.

Les analyses toxicologiques des cheveux négatives

Le parquet de Besançon a apporté des précisions jeudi 1er septembre en fin de journée. Le dossier sera transmis d’ici quelques jours au parquet de Dijon car les faits dénoncés auraient été commis à Beaune, comme l’a précisé Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon.

« Le rapport toxicologique ne fait pas apparaître de soumission chimique en tant que telle » a ajouté le procureur, qui dispose désormais des analyses toxicologiques des cheveux d’Océane.

Concernant l’audition du mis en cause, qui n’a pas encore eu lieu, elle devra être effectuée par le parquet de Dijon, désormais compétent dans cette affaire.

(source: faitdivers et FR3)

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

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