France

Les différences entre les programmes de Macron et Le Pen

Analyse d'un œil citoyen

Après vous avoir présenté les mesures des deux finalistes dans la course à l’Élysée, quelles étaient les différences profondes entre les deux programmes.

Douze jours durant, vous avez pu retrouver les programmes d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen pour la présidence de la République.

Découvrir les mesures que promettent les deux prétendants à l’Élysée une fois élu(e).

Et, alors que la campagne se termine ce vendredi 22 avril 2022 à 23 h 59, il est grand temps de pointer les divergences, nombreuses, mais aussi les convergences dans les programmes des candidats de La République en marche et du Rassemblement national.

Le débat d’entre-deux-tours a permis de pointer du doigt de profondes différences dans les idées. Les programmes, eux, le montrent encore davantage.

Des énergies contraires

Sur la question climatique, et principalement des énergies, les deux finalistes sont d’accord sur le nucléaire, mais pas vraiment sur le reste.

Quand Emmanuel Macron prévoit de construire « six premières centrales nucléaires nouvelle génération (EPR) », Marine Le Pen propose, elle, de « relancer la filière nucléaire avec 20 EPR d’ici à 2036» .

Pour le reste, la candidate d’extrême-droite ne compte pas vraiment sur les énergies renouvelables. Marine Le Pen arrêterait « les projets éoliens et démantèlerait progressivement les parcs existants ».

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A contrario, le président-candidat prévoit l’implantation de 50 parcs éoliens en mer d’ici à 2050. Il a répété à plusieurs reprises lors d’échanges qu’il souhaitait mixer le nucléaire avec les énergies renouvelables.

Sur le climat en général, Emmanuel Macron a pour objectif la neutralité carbone pour 2050 quand Marine Le Pen veut définir des objectifs de réduction carbone chaque année en fonction des trajectoires des autres pays.

Divergence sur les retraites

Alors qu’ils parviennent parfois à converger sur des sujets économiques, comme sur la suppression des droits de succession par exemple, sur les retraites, c’est peu dire qu’ils ne s’entendent pas du tout.

Là où, Emmanuel Macron désire relever progressivement l’âge de départ à la retraite à 65 ans, supprimant au passage les principaux régimes spéciaux pour les nouveaux arrivants, Marine Le Pen n’allongerait pas l’âge de départ. Elle veut même permettre à ceux qui ont commencé leur carrière avant 20 ans et qui auraient 40 annuités, de prendre leur retraite à 60 ans.

Autre point de désaccord : la prétendante du RN revalorise le minimum vieillesse à hauteur de 1 000 euros, quand Emmanuel Macron monte ce minima à 1 100 euros.

Hausse des salaires contre hausse de la prime

Ce fut l’une des passes d’armes marquantes du débat d’entre-deux-tours : sur la question des salaires, les deux candidats proposent des manières différentes de les augmenter.

Marine Le Pen défend une « exonération de cotisations patronales, en cas d’augmentation de 10 % des salaires (jusqu’à trois fois le Smic) », quand Emmanuel Macron annonce qu’il triplera la prime éponyme et proposera un dividende salarié pour les entreprises qui versent des rétributions à leurs actionnaires.

« Vous n’allez pas faire les salaires, Mme Le Pen ». « Tout comme vous n’allez pas faire les primes, M. Macron », se sont répondu les deux candidats sur le plateau de TF1 et France 2.

Je ne voudrais pas que celles et ceux qui nous écoutent pensent qu’avec vous, leur salaire va augmenter de 10%, ce n’est pas automatique.
Emmanuel Macron
Candidat La République en marche

Et Marine Le Pen de lui rétorquer : « Dans la vraie vie, quand vous allez chercher un prêt auprès de votre banquier, il vous demande votre salaire et il se moque des primes. »

Marine Le Pen, plus radicale sur l’immigration

S’ils ont pour projet d’expulser les étrangers qui « troublent l’ordre public », la candidate d’extrême-droite va bien plus loin dans son programme pour « arrêter l’immigration incontrôlée ».

Marine Le Pen veut ainsi supprimer le droit du sol, et limiter la nationalité à la seule naturalisation sur des critères de mérite et d’assimilation. Emmanuel Macron aussi veut durcir un peu les règles avec des titres de long séjour accordés pour ceux qui réussissent un examen de français et s’insèrent professionnellement.

Mais la finaliste du RN, souhaite aussi réserver les aides sociales aux français et surtout inscrire la préférence nationale (pour le logement et l’emploi) dans la Constitution. Une réforme qui ferait passer les étrangers en second. D’ailleurs, les emplois publics ne seront pas ouverts aux personnes qui possèdent une autre nationalité que française.

Dans son programme, la « loi permettra de poursuivre et de condamner les personnes qui apportent une aide directe ou indirecte aux étrangers qui tentent d’entrer illégalement sur le territoire ».

Sortir ou rester dans l’Union européenne

Ce n’est pas un secret, Emmanuel Macron, qui se dit « profondément européen » veut rester dans l’Union européenne, Marine Le Pen prône une réforme en profondeur pour la transformer en « Europe des Nations« .

Elle désire notamment revoir les accords de libre-échange qui, selon elle, « ne respectent pas les intérêts de la France ».

Emmanuel Macron, lui, souhaite « assurer la puissance de l’Europe« . Cela passe, selon le candidat LREM, par une autonomie énergétique (réduire la part des énergies importées), technologique et par un « renforcement considérable des armées européennes ».

Le président sortant estime par ailleurs que sa rivale, souhaite quitter l’Union européenne, (comme en 2017, Ndlr), sans jamais le mentionner. Lors du débat, il l’a accusée de ne pas dire la vérité sur son programme européen : « Vous mentez sur la marchandise ».

Quelques convergences sur les sujets sociétaux

Éducation

Il y a quand même des points communs, du moins des rapprochements entre les deux prétendants. Ils veulent tous deux augmenter les salaires des enseignants, Marine Le Pen, de 3% et Emmanuel Macron si les professeurs acceptent de nouvelles missions.

Il a toutefois indiqué que les enseignants seraient augmentés de 10% environ en janvier 2023 en cas de réélection. Sans condition.

Si tous deux se battent pour plus de français et de mathématiques dans les programmes scolaires, l’une des mesures phares de Marine Le Pen est de réformer le bac, en abrogeant notamment la loi Blanquer.

Emmanuel Macron défend lui le retour des maths dans le tronc commun du lycée.

Droit des femmes

S’il reste président, ce sera de nouveau une grande cause du quinquennat Macron II : l’égalité entre les hommes et les femmes. Le candidat La république en marche promet un » « testing  » de chaque entreprise de plus de 5 000 salariés dans la lutte contre les discriminations à l’embauche, avec poursuite contre les entreprises coupables ».

Marine Le Pen n’a pas fait de mesure sur ce sujet, mais sur la question des outrages sexistes, propose d’inscrire les personnes condamnées pour ces faits, au fichier des criminels et délinquants sexuels.

Emmanuel Macron propose, lui, de tripler les amendes pour outrage sexiste.

Tous deux veulent maintenir l’interdiction de la gestation par autrui (GPA). Sur l’IVG, la députée du Pas-de-Calais reviendrait sur le délai, le ramenant à 12 semaines contre 14 aujourd’hui. Le candidat LREM y est opposé.

Religions et laïcité

Quand on regarde les programmes de deux candidats en matière de religions et de laïcité force est de constater que les mesures ne concernent que l’islamisme.

Marine Le Pen en a fait l’un de ses piliers pour son programme et entend « interdire la pratique, la manifestation ainsi que la diffusion publique de l’idéologie islamiste afin « d’éradiquer les idéologies islamistes du territoire » ».

Emmanuel Macron veut lui poursuivre la « fermeture des associations et des mosquées radicales, des écoles clandestines ».

Mais Marine Le Pen va plus loin sur la question du foulard islamique. Lors du débat d’entre-deux-tours elle a indiqué, « très clairement », qu’elle l’interdirait dans l’espace public.

Ce à quoi son concurrent lui a répondu que c’était « infaisable », et qu’elle allait créer une « guerre civile ».

« La France, patrie des Lumières, sera le premier pays au monde à interdire un signe religieux dans l’espace public. […] C’est une loi de rejet. […] C’est une trahison de l’esprit français et de la République. »

« Rien n’est joué »

Emmanuel Macron est donné vainqueur dans une fourchette allant de 55,5 à 57,5% des intentions de vote. Cet écart s’est creusé au fil de la campagne, mais il reste moindre qu’en 2017 quand le candidat En Marche avait remporté l’élection avec 66,1% des voix, contre la même candidate d’extrême droite.

« Rien n’est joué », a averti jeudi le président candidat, appelant ses partisans à « redoubler d’efforts », au cours d’un déplacement consacré aux banlieues et à la rénovation urbaine en Seine-Saint-Denis.

Vendredi, après la matinale de France Inter, Emmanuel Macron « parlera à Figeac, dans le cœur de la France, de la ruralité, des délocalisations… », selon un conseiller.

Avant le second tour dimanche, Emmanuel Macron présente le scrutin comme celui du choix entre « un projet républicain et un projet de sortie de la République, de sa laïcité, de sa fraternité ».

« Front anti-Macron »

La candidate du Rassemblement national a elle tenu jeudi soir à Arras, la préfecture du Pas-de-Calais, son dernier meeting, qui a pris des allures de « tout sauf Macron ». Fustigeant « un Emmanuel Macron nonchalant, condescendant, et d’une arrogance sans limites », lors du débat de mercredi, Marine Le Pen a promis d’être « la présidente du respect des Français ».

Dimanche, « la question sera finalement assez simple : Macron ou la France ? », a-t-elle lancé, appelant à voter « pour le seul front qui soit républicain, le front anti-Macron ».

La candidate tente ainsi de détourner à son avantage la notion de « front républicain » et de « tout sauf l’extrême droite », levier actionné en 2002 contre son père puis en 2017 contre elle-même pour faire barrage à l’extrême droite.

Marine Le Pen sera encore sur le terrain vendredi. Elle mettra un point final à sa campagne à Abbeville, dans la Somme, ville où elle est arrivée en tête au premier tour devant son adversaire.

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

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