Politique

Marine Le Pen : Si je suis élu présidente …

Première décision : un référendum sur l’immigration

Invitée mardi 23 mars sur la matinale de France Inter, Marine Le Pen a fait savoir que sa première décision en cas d’élection à la présidence serait l’organisation d’un référendum sur l’immigration. La maîtrise des frontières et une réforme fiscale visant à relâcher la pression sur les classes moyennes seraient également prioritaires.

Mardi 23 mars, Marine Le Pen a énoncé sur France Inter les «décisions fortes» par lesquelles elle commencerait son mandat si elle était élue Présidente de la République.

Elle a ainsi fait savoir que sa «première décision serait l’organisation d’un référendum sur l’immigration».

«Je pense que cela fait maintenant des décennies que les différents gouvernements prennent des décisions en matière d’immigration sans que jamais le peuple français n’ait été entendu ou n’ait été questionné sur ce sujet», a-t-elle détaillé.

Mme Le Pen croit savoir que «le peuple français est en désaccord depuis des décennies avec la politique qui est menée en matière d’immigration».

La maîtrise des frontières et une réforme fiscale

«Deuxièmement, j’irai auprès de la Commission européenne leur expliquer ce que je considère comme étant non négociable dans le domaine de la souveraineté nationale et notamment la maîtrise de nos frontières car je considère que la maîtrise des frontières relève de la souveraineté nationale», a-t-elle enchaîné.

Sa troisième mesure majeure porterait sur une réforme fiscale car elle trouve que «la pression qui pèse sur les classes moyennes aujourd’hui est une pression qui est insoutenable».

«Que la nationalité s’hérite ou se mérite»

Marine Le Pen avait déjà affirmé que si elle accédait à l’Élysée en 2022, ses premières décisions concerneraient l’immigration.

«Ma première décision sera de maîtriser l’immigration par la reprise en main de nos frontières, de notre politique de visas», avait-elle déclaré début février sur BFM TV et RMC.

«J’irai voir les pays dont sont issus les immigrés pour leur dire qu’ils doivent reprendre leurs compatriotes lorsque ceux-ci sont en situation irrégulière».

La présidente du Rassemblement national avait de plus annoncé son intention de changer «le code de la nationalité pour que la nationalité française s’hérite ou se mérite».

Cahier d’actions sur l’immigration

Dans le cahier d’actions du Rassemblement national «Asile/immigration» d’avril 2018, l’immigration irrégulière avait été qualifiée de «fléau» auquel les gouvernements successifs ne s’étaient pas attaqués.

Pour y faire face, le document avait proposé de réguler les flux migratoires en amont, de maîtriser l’immigration en France et de revitaliser l’assimilation républicaine.

Marine Le Pen peut gagner la présidentielle en 2022, prévient Bruno Le Maire

Une victoire de Marine Le Pen, la présidente du Rassemblement national (RN), à l’élection présidentielle de 2022 est une possibilité, a déclaré samedi Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie.

«L’élection de Marine Le Pen, on le sait tous, est une possibilité», a-t-il annoncé sur BFM TV. «C’est une possibilité politique. Elle doit donc être combattue. Combattue avec des idées, combattue avec des convictions, combattue avec des résultats, combattue avec des hommes et des femmes qui s’engagent.»
Soutien à Macron

Bruno Le Maire a réaffirmé son soutien à Emmanuel Macron en vue du scrutin de l’an prochain.

Marine Le Pen contre Gérald Darmanin:
Le débat opposant Marine Le Pen à Gérald Darmanin sur France 2 a fait apparaître de nombreuses confusions et contre-vérités sur la réalité des chiffres de l’immigration en France. Devant les caméras, l’ancien haut fonctionnaire Patrick Stefanini a fait le point sur ce sujet qui embrase le débat public.

Décryptage…
Évaluer l’ampleur réelle de l’immigration en France, la question revient régulièrement dans le débat public. Jeudi 11 février, Marine Le Pen et Gérald Darmanin se sont écharpés sur France 2 autour de cette question sensible, qui continue de préoccuper les Français.

Selon un sondage YouGov publié en avril 2019, l’immigration arrive en troisième position des préoccupations principales des Français (21%), derrière le chômage (27%) et le pouvoir d’achat (36%). Une problématique sur laquelle revient Patrick Stefanini, ancien haut fonctionnaire et auteur Immigration: ces réalités qu’on nous cache (Éd. Robert Laffont).

Plusieurs contre-vérités ou approximations ont été assenées au cours de ce débat, aussi bien de la part du ministre de l’Intérieur que de la présidente du Rassemblement national. Ainsi, Gérald Darmanin a-t-il commencé par affirmer qu’il y avait actuellement «cinq millions d’étrangers en France». Ce qui est factuellement vrai, puisque selon le dernier recensement de 2018, 4,7 millions d’étrangers résideraient sur le sol français.

De même, le locataire de la place Beauvau a-t-il indiqué qu’entre 1982 et 2019, il n’y avait qu’«un million d’étrangers de plus en France», soit une augmentation de «6,8% à 7,4%» de la part de population étrangère. De quoi faire relativiser le terme d’«invasion migratoire», voire de «grand remplacement» repris à l’envi par l’extrême droite française et européenne.

Augmentation de 83% du nombre de titres de séjour entre 2000 et 2019

Débat Darmanin-Le Pen: quel bilan depuis l’entre-deux tour 2017?
Sauf qu’en réalité, ce chiffre est trompeur, car la politique française en matière de naturalisation s’est largement libéralisée au cours des dernières décennies. «Cette stabilité du pourcentage des ressortissants étrangers dans la population française ne nous a rien dit de l’immigration», explique Patrick Stefanini. «Elle nous a beaucoup dit en revanche de nos pratiques en matière d’accès à la nationalité française. En effet, cette stabilité traduisait seulement le fait que la dynamique des naturalisations effaçait des statistiques des ressortissants étrangers, année après année, une partie des immigrés», écrit notre interlocuteur dans son livre Immigration: ces réalités qu’on nous cache (Éd. Robert Laffont). Or, selon la démographe Michèle Tribalat, entre 2000 et 2016, la part des enfants ayant au moins un parent étranger est passée de 15% à 24% en France.

L’accès au territoire français a en revanche crû de manière significative en l’espace de quelques années.
«Le nombre de titres délivrés en 2019 est supérieur de 83% au nombre de titres délivrés en 2000», explique l’ancien secrétaire général du ministère de l’Immigration et de l’Intégration de Nicolas Sarkozy.

Les chiffres sont sans appel: en 2000, le nombre de titres de séjour délivrés par la France à des ressortissants de pays tiers (ce qui exclut les ressortissants de l’Union européenne, qui ne requièrent pas de titre de séjour pour rester sur le territoire national) était de 150.000. En 2019, selon le ministère de l’Intérieur, ce chiffre grimpe à un peu plus de 277.000, ce qui a d’ailleurs été rappelé par Gérald Darmanin sur France 2.
Selon MLP, «471.000 titres de séjour» ont été délivrés en 2019

Marine Le Pen, de son côté, a avancé le chiffre de «471.000 titres de séjour délivrés en 2019». La candidate du Rassemblement national serait donc loin du compte, tant et si bien que son adversaire l’a accusée de colporter des «fake news» sur le sujet. Mais là encore, la statistique du nombre de titres de séjour ne prend pas en compte deux éléments importants dans l’afflux migratoire en France: le nombre de demandes d’asile et les arrivées des fameux «mineurs isolés», désormais appelés «mineurs non accompagnés» (MNA). «Vous oubliez les mineurs isolés et les 177.000 demandeurs d’asile qui ne sont pas comptabilisés dans ces chiffres», a ainsi rétorqué Mme Le Pen.

132.000 demandes d’asile sont déposées chaque année en France (il y en avait 40.000 en 2000), et 36.000 sont accordées (soit sept fois plus qu’il y a vingt ans). Concernant les mineurs isolés, l’Association des départements de France (ADF) estime que pour la seule année 2020, la France a accueilli près de 40.000 d’entre eux (soit une multiplication par trois depuis 2016). On ne saurait toutefois additionner le nombre de demandes d’asile au nombre de titres de séjour délivrés, car les deux catégories se confondent en partie, certains demandeurs d’asile obtenant un titre de séjour.
96% des déboutés du droit d’asile restent sur le sol français

Marine Le Pen a donc surévalué le nombre annuel d’arrivées d’immigrés légaux sur le sol français. Acculée, la députée du Pas-de-Calais a répliqué que «le problème de notre pays, c’est que les déboutés du droit d’asile ou les mineurs isolés restent sur notre sol.» Ce qui est vrai pour 96% des déboutés du droit d’asile, selon la Cour des comptes.

Ceux qui n’obtiennent pas de titre de séjour se transforment automatiquement en clandestins, au titre de l’immigration illégale. Pour la première fois, souligne Patrick Stefanini, le ministre de l’Intérieur a donné le chiffre de «600.000 clandestins» présents sur le sol français. Auparavant, ce chiffre était déduit des 320.000 bénéficiaires de l’Aide médicale d’État (AME), cette allocation créée en 1999 par le gouvernement Jospin qui prévoit un accès gratuit aux soins aux clandestins présents sur le territoire depuis plus de trois mois. L’ancien haut fonctionnaire estime que ce chiffre de 600.000 est encore sous-estimé, car environ un tiers seulement des clandestins ont recours à cette aide: il estime que «le nombre de clandestins sur sol français se situe entre 600.000 et 900.000 environ.»

Et la France a toutes les difficultés du monde à faire exécuter les procédures d’éloignement des immigrés illégaux, appelées OQTF (obligation de quitter le territoire français) dans le jargon administratif. Marine Le Pen a avancé le chiffre de «12,6%» d’OQTF exécutées en France, contre «90%» en Allemagne, selon elle. Ce chiffre est inexact, mais la réalité n’est guère plus glorieuse pour la France. En réalité, le taux d’exécution des OQTF varie entre 15% et 20%. En 2013, sur les 89.000 procédures d’éloignement prononcées, seules 15.000 ont ainsi été exécutées, soit un taux de 17%.

Selon un rapport de spécialistes du droit étranger publié en janvier 2020 et adressé au gouvernement français, le taux d’exécution des procédures d’éloignement serait de 33% dans l’UE, et de 55% (et non 90%) en Allemagne.

«Suicide démographique de l’Europe»

Dans livre, Stefanini affirme que, depuis 2016 et pour la première fois dans l’histoire française, le solde migratoire des immigrés est supérieur au solde naturel (excédent des naissances sur les décès).

«Entre 2000 et 2015, la population de l’UE a crû de 20 millions, dont un cinquième seulement en raison du solde naturel. En 2080, si l’on prolonge les tendances démographiques actuelles, l’Union pourrait perdre jusqu’à 100 millions d’habitants, sa population revenant à son niveau de 1960. Il s’agirait d’une sorte de suicide démographique et économique», écrit ainsi l’ancien haut fonctionnaire.

À l’issue du débat, Gérald Darmanin a affirmé sur Twitter que «la théorie du grand remplacement de l’extrême droite n’est pas très sérieuse». Si Patrick Stefanini estime que les chiffres ne permettent pas d’affirmer avec certitude le remplacement de la population européenne par une population africaine, car «les chiffres de l’INSEE prennent en compte toute l’immigration, y compris l’immigration européenne», le basculement démographique du continent européen et a fortiori de la France semble ne faire aucun doute selon lui. «Il y a revanche lieu de souligner que la démographie française ne permet plus d’assurer le renouvellement des générations, car son indicateur conjoncturel de fécondité se situe en dessous de 2», précise-t-il.

Le duel tant attendu entre Marine Le Pen et Gérald Darmanin n’aura donc pas donné de vainqueur, chacun y allant de ses approximations et de ses accommodements avec la réalité du phénomène migratoire. Reste que «l’accélération de l’immigration en France n’est pas contestable».

David SCHMIDT

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

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