David SCHMIDTFrance

Vers le déclin du catholicisme

Les catholiques vont de moins en moins à la messe

Si les catholiques vont de moins en moins à la messe, ils n’ont pas pour autant disparu de la société française. Ils continuent à vivre leur foi, mais en marge de la paroisse, impliqués dans des organisations de natures très diverses.

Pour mesurer l’ampleur de la crise que connaît le catholicisme, il faut se reporter à la situation qui était encore la sienne au milieu des années 60. La quasi-totalité des Français affichaient une religion. Presque tous, parce qu’ils étaient baptisés à 96 %, se disaient catholiques. Près de la moitié d’entre eux pratiquaient régulièrement. Le rôle éminent du clergé dans son magistère moral, reconnu par tous, demeurait grâce à de puissantes institutions sociales (l’Action catholique sous ses différentes formes, la presse catholique). Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Le catholicisme est en complète transformation. Les changements en cours se situent sur le plan de la vie en société et, de ce point de vue, les catholiques se distinguent moins que par le passé. Par ailleurs, sur le plan organisationnel, on assiste actuellement à une complète réorganisation des cadres paroissiaux. Mais le changement le plus spectaculaire concerne les pratiques traditionnelles.

Chute de la pratique religieuse en France

Il faut se rendre à l’évidence, on a assisté au cours des trente dernières années à un véritable effondrement de la pratique. Les travaux pionniers du chanoine Boulard, qui datent des années 60, font état de taux de pratique religieuse encore très élevés. A l’époque, la plus grande partie des diocèses comptaient entre 25 et 50 % de pratiquants réguliers. Seuls huit d’entre eux affichaient un taux de pratique inférieur à 10 %. Il s’agissait des diocèses installés dans des zones de culture anticléricale : le Limousin, la Corrèze et la Provence en particulier. A cela s’ajoutaient des zones dites « de pratique majoritaire » : l’Ouest armoricain avec la Bretagne, la Vendée et l’Anjou, les pourtours méridionaux du Massif central, le Pays basque et l’Alsace-Lorraine. Dans ces régions, le taux de pratique dominicale était dans tous les cas supérieur à 75 %. A la même époque, les catholiques faisaient fidèlement leurs Pâques. Dans certains cantons ruraux, on comptait plus de 90 % de pascalisants, en particulier dans les régions les plus pratiquantes de l’Ouest, des Cévennes et des Pyrénées occidentales. Ce taux était de plus de 50 % dans plus de la moitié des campagnes françaises.

Cette image de la France religieuse des années 60 est importante pour comprendre la situation actuelle. De toute évidence, les pourcentages d’observance dominicale (la présence à la messe le dimanche) et pascale (la participation annuelle à l’Eucharistie au cours de la période de Pâques) ont subi une chute vertigineuse. En une trentaine d’années, et malgré le poids de la tradition et de l’habitude, les pratiques religieuses ont été bouleversées. Le taux moyen de messalisants réguliers (allant à la messe tous les dimanches) était d’environ 45 % vers 1960. Actuellement, les estimations varient d’autant plus que la régularité n’a plus le même sens et devient la participation à l’office dominical deux fois par mois. Une étude réalisée par l’Insee fait apparaître un taux de pratique régulière de 16 % pour 1998. Toujours pour 1998, l’étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) montre que sur les 73 % de Français qui se disent catholiques, 10 % se déclarent, dans les sondages, des pratiquants dominicaux fidèles et réguliers, et 24 % vont à la messe assez irrégulièrement. La méthode est différente de celle mise en place par le chanoine Boulard, ce sont les sondés qui évaluent la régularité de leur pratique. Outre qu’elle recèle une part d’incertitude, elle aboutit à des résultats difficilement comparables avec les précédents. Les curés des paroisses estimaient alors la régularité de l’extérieur, sans consulter les pratiquants comme le font les sondeurs de l’Insee et du Crédoc. Cependant, malgré ces différences méthodologiques, on peut néanmoins estimer qu’en trente ans la chute de l’assiduité dominicale a été d’au moins 65 %.

628 églises dégradées en 2018

Pour l’année 2018, le nombre réel d’églises mises à sac serait en fait de 628, selon Les Décodeurs du journal Le Monde. C’est un peu moins que le décompte du Figaro. 40 est le nombre de mosquées qui auraient connu un sort similaire. Les plus doués en mathématiques auront déjà calculé une division de l’ordre de quinze. Pour ma part, je ne me joins pas à de tels calculs, car comme chacun sait, amalgame rime avec infâme.

Enfin… Songez aux croisades sanglantes pour récupérer le Saint-Sépulcre. Songez au Pape Jean Paul II résolument contre le droit à l’IVG. Songez au Cardinal Barbarin. Songez à tout le mal que des curés en mal d’amour ont fait subir à des petits garçons. Songez à ces dangereux petits vieux qui ont manifesté contre le Mariage pour tous. Vous conviendrez donc que 628 églises passées à tabac, c’est inévitable.

L’Église adore tendre la joue gauche

Assez de sarcasmes: la pédophilie au sein de l’Église catholique reste un scandale injustifiable. Mais comment dire… cette pratique dégueulasse, si on en a autant parlé, c’est parce qu’il y a des lois qui la condamnent. C’est le cas en France comme dans nombre de pays occidentaux. Ce n’est pas le cas dans de “grandes démocraties” aux lois façonnées par les vers du Saint Coran, où les mariages avec de jeunes fillettes à la peau douce et au cœur pur sont halal.

Trève d’islamophobie! Il n’y a pas que chez les adeptes du prophète Mahomet et sa tendre Aïcha, ou chez ceux du bon Jésus que ça peut déraper: selon l’OMS, en Inde, pays qui compte moins de 2% de catholiques, 40 % des enfants seraient victimes d’abus sexuels, rappelait l’essayiste André Perrin en mars dernier. Malgré cette réalité, les catholiques paient les frustrations de certains curés et ils prennent cher. Traditionnellement, un vieil adage catholique veut que l’on tende la joue gauche lorsque l’on se fait taper dessus. C’est fort honorable, certes, mais 628 églises vandalisées, ce n’est plus seulement tendre la joue gauche. À ce stade, l’impassibilité relèverait plus du masochisme que de la sagesse de Saint Augustin.

Objets d’une infinie sollicitude lorsqu’ils subissent le joug de prêtres pédophiles, les catholiques suscitent une indifférence polie quand leurs églises et cimetières sont profanés. Dans une France jadis fille aînée de l’Église, la catholicité cumule le poids du statut majoritaire et les handicaps d’une minorité que l’on somme d’être silencieuse. Comme le résume Elisabeth Lévy, “les chrétiens, otages de la guerre des civilisations en Orient, sont partie prenante de celle qui sévit à bas bruit dans nos contrées”. Certes, nombre de profanations “sont l’œuvre de déséquilibrés, de marginaux ou de gamins en mal de transgression sans risque” mais l’indifférence quasi-générale que suscite le phénomène laisse coi.

“Certains n’ont pas envie de prêter attention aux attaques dont l’Église est victime”

La fille aînée de l’Église aurait-elle oublié ses racines ? Pour le politologue Jérôme Fourquet, de l’Ifop, “l’Église a si longtemps occupé une place très importante dans la société française que certains n’ont pas envie de prêter attention aux attaques dont elle est victime”. La grande enquête d’Erwan Seznec donne la parole à ces catholiques qui remettent en doute le bien-fondé de la ligne officielle, qui consiste à jouer l’apaisement pour éviter la surenchère victimaire.

Certains catholiques, enfin, pas toujours pratiquants ni membres des nouveaux mouvements religieux, se signalent par leur activité de solidarité dans la cité. Leur action vient s’ajouter à celles, syndicales, civiques et politiques des générations formées dans les rangs de l’Action catholique. Elle vise la recherche de solutions face à la montée des exclusions et des nouvelles formes de pauvreté apparues au cours des années 80. Les catholiques sont nombreux dans les structures comme le Secours catholique (70 000 militants, un million de donateurs ou acteurs), qui revendiquent explicitement leur affichage religieux. Mais ils ne le sont pas moins dans d’autres mouvements, associations ou entreprises d’entraide ou d’insertion sans affichage religieux particulier (Partage, les Restos du cœur…).

Le purgatoire a suffisamment duré

Ce serait ridicule. Il n’empêche que d’ici vingt ou trente ans, les catholiques devront peut-être faire comme les juifs pour vivre leur foi: émigrer. Si le Brésil n’est peut-être pas la terre d’avenir espérée par Stefan Zweig en son temps, il est assurément l’une des terres saintes du catholicisme. Quant à la France, elle est maintenant la fille aînée qui a déserté l’Église. Chateaubriand n’étant plus là pour nous expliquer à quel point le christianisme est une puissance formidable, souhaitons qu’un homme ou une femme, catholique pure souche ou d’adoption, tel Clovis, émerge pour redonner aux catholiques un brin de fierté !

David SCHMIDT

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

Articles similaires

Donnez-nous votre avis sur cette article !

Bouton retour en haut de la page