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Le continent africain est en train de se séparer en deux

Un impressionnant gouffre est apparu au sud-ouest du Kenya, à la suite de fortes précipitations.

Un phénomène géologique est en train de diviser le continent africain en deux, au niveau de la vallée du grand Rift qui traverse les pays du sud-est de l’Afrique. Les scientifiques s’y attendent depuis des années. Mais des événements récents laissent penser que les choses s’accélèrent.

Les scientifiques y voient une nouvelle marque d’une rupture progressive du continent africain.

Le matin du 19 mars 2018, une gigantesque faille est apparue en plein milieu de la route Mahiu-Narok, au Kenya. Descendant jusqu’à plus de 15 mètres de profondeur et mesurant 3 kilomètres de long, cette impressionnante cicatrice fait suite aux pluies abondantes qui ont alors touché le pays. « Dans un passé récent, la vallée du Rift, elle, est peut-être restée inactive sur le plan tectonique, indique encore David Adede dans The Independent. Mais il pourrait y avoir des mouvements profonds dans la croûte terrestre qui ont donné lieu à des zones de faiblesse qui s’étendent jusqu’à la surface. Ces zones de faiblesse forment des lignes de failles et des fissures qui sont normalement remplies de cendres volcaniques, probablement du mont Longonot voisin. Les pluies n’ont fait qu’aggraver la situation en lavant les cendres, ce qui a fini par exposer les fissures. »

Selon les géologues, il est probable que cette fissure existait auparavant et était remplie de cendres volcaniques du mont Longonot voisin. L’eau des pluies aurait alors chassé les cendres laissant apparaitre la cicatrice. Toutefois, elle pourrait être la marque d’un phénomène bien plus profond et spectaculaire : la séparation du continent africain.

Une activité fréquente, témoin de changements profonds

Ce n’est pas la première fois que la route de Mahiu-Narok fait des siennes : « Il semble y avoir une faiblesse dans cette zone », explique Julius Korir, responsable de l’infrastructure. Une nouvelle fois, la route a été remblayée afin de permettre au plus vite la reprise du trafic. Toutefois, cette solution d’appoint risque bien de ne pas suffire sur le long terme.

« La Terre est une planète en constante évolution, même si sous certains aspects, les changements qui l’animent nous semblent presque invisibles », écrit sur le site The Conversation, la chercheuse Lucia Perez Diaz du Royal Holloway à la University of London. « Mais de temps à autres, un événement spectaculaire se produit et amène les chercheurs à poser à nouveau la question de la séparation en deux du continent africain ».

Quand la planète s’offre un rifting

La lithosphère terrestre est formée par la croûte et la partie supérieure du manteau de notre planète. Cette structure est divisée en plusieurs plaques tectoniques, en mouvement les unes par rapport aux autres. Les forces à l’origine de ces déplacements peuvent également amener certaines plaques à se rompre et à créer de nouveaux îlots terrestres, dérivant sur l’asthénosphère.

« Lorsque la lithosphère est soumise à une force d’extension horizontale, elle s’étire et devient plus fine. Elle finira par se fracturer, menant à la formation d’une vallée du rift », poursuit la spécialiste. Ce processus s’accompagne d’une activité volcanique et sismique plus marquée et s’il se poursuit avec succès, peut mener à la formation d’un nouveau bassin océanique.

C’est ce qu’il s’est produit il y a environ 138 millions d’années lorsque l’Afrique et l’Amérique se sont séparées pour donner naissance à l’océan Atlantique. Et c’est ce qu’il se produit actuellement au niveau de la vallée du grand rift, un ensemble géologique s’étendant sur près de 3.000 kilomètres entre le Proche-Orient et l’Afrique australe. Cette vallée du rift coupe en deux la corne africaine à l’est, donnant d’un côté la plaque nubienne et de l’autre la plaque somalienne.

Une Afrique multiple est en chemin

Débuté il y a environ 20 millions d’années, au Miocène, ce rifting (déchirure de la lithosphère) pourrait bien, dans les prochains millions d’années, mener à une individualisation et une océanisation de la plaque somalienne. En somme, l’Afrique pourrait bien être divisée en deux. Cette activité géologique « est devenue visible lorsque cette large faille est apparue au sud-ouest du Kenya », affirme Perez Diaz.

La fragilisation de la lithosphère de la vallée du grand rift est provoquée par un panache au niveau de l’asthénosphère, la couche située sous la lithosphère. Ce renflement de magma presse contre cette dernière et cette pression, combinée à une augmentation de chaleur, affaiblit la lithosphère, l’étire, et mènera à terme à sa fracture.

A l’heure actuelle, difficile de dire si la fissure apparue au Kenya est le résultat direct de ce système de rift. Elle pourrait également être liée à l’activité volcanique de la région, qui découle elle-même du processus de rifting. Quoi qu’il en soit, pas de raison de s’alarmer : la rupture de l’Afrique n’est prévue que dans quelques dizaines de millions d’années. Vous disposez donc d’un peu d’avance pour prendre vos dispositions.

Un nouveau continent dans 50 millions d’années

« Les scientifiques savent depuis plusieurs années déjà que la plaque tectonique africaine se sépare de la plaque somalienne au niveau de la vallée du grand Rift, un phénomène géologique qui s’étend de la mer Rouge au Zambèze, sur plus de 6 000 km et 40 à 60 km de largeur », confirme David Adede, un géologue cité par le journal britannique, The Independent.

Quatre pays de la Corne d’Afrique – la Somalie, la moitié de l’Éthiopie, du Kenya et de la Tanzanie – devraient ainsi se séparer de l’Afrique pour former un nouveau continent dans environ 50 millions d’années. Un nouvel océan apparaîtra et séparera les deux rives. C’est en tout cas ce qu’ont toujours prévu les géologues.

(Source : The Independent, ouest-france)

David SCHMIDT

Journaliste reporter sur Davidschmidt.fr. Chroniqueur radio sur Form.fr.

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