La recette infaillible du bonheur

Le bonheur, cette douce quête universelle, cette chimère insaisissable, qui semble se dérober à nos pieds à mesure qu’on la poursuit, un peu comme le Wi-Fi dans les zones rurales. Mais rassurez-vous, il paraît qu’il existe une solution simple, tellement simple que l’humanité entière aurait pu y penser il y a des millénaires : faire des bonnes actions.

Voilà, vous l’avez. Le secret de l’âme légère et du cœur en fête. Mais attendez, pas n’importe comment ! On parle ici de donner de sa personne. Genre, vraiment y aller à fond. Sacrifier un peu (ou beaucoup) de vous-même, histoire de vous acheter un ticket pour le nirvana intérieur ou la « LA REPENTANCE » pour d’autres.

Bonne action n°1 : Le sourire forcé, un cardio pour votre âme !

Vous êtes à la caisse du supermarché, derrière cette mamie qui paye son kilo de carottes avec de la petite monnaie, lentement, très lentement. La patience s’amenuise, l’envie de dire quelque chose de politiquement incorrect monte… Mais là, hop, vous souriez. Un grand sourire qui dit « Prenez votre temps, chère madame, je n’ai que ça à faire de ma journée ». Félicitations, vous venez de donner de votre personne. C’est gratuit, et paraît-il, ça fait du bien à votre morale. L’avantage ? Vous pouvez rentrer chez vous, vous regarder dans le miroir et vous dire : « Aujourd’hui, j’ai fait une bonne action, j’ai sauvé l’humanité ». Enfin, presque.

Selon les experts de la psychologie positive, ceux qui vivent dans un monde où un sourire résout tout, même les embouteillages – ce genre d’actes anodins aurait un impact direct sur votre bien-être. En gros, vous souriez, donc vous êtes heureux. Simple comme bonjour, non ?

Bonne action n°2 : Offrez votre temps… et votre santé mentale

On le sait tous, le temps, c’est de l’argent. Et l’argent, c’est le bonheur, n’est-ce pas ? Alors quand on vous dit que donner de son temps vous rendra heureux, on vous ment ou quoi ? Spoiler : ce n’est pas de l’argent en retour que vous récolterez, mais une tonne de bonne conscience. Ah, la bonne conscience, ce doux nectar des âmes pures.

Imaginez-vous passer votre samedi après-midi à aider une association à ramasser des déchets dans un parc ou dans la forêt. Sous la pluie, avec un gilet fluo. Quoi de mieux pour votre moral que de renifler un mélange de canettes vides et de mégots de cigarettes, tout en vous disant que, quelque part, la faune et la flore de votre villes vous envoie des ondes positives ? Vous allez rentrer chez vous, trempé, épuisé, mais heureux. Oui, heureux d’avoir donné, heureux d’avoir sacrifié vos plans Netflix & canapé pour sauver la planète une canette à la fois. Mais ne vous attendez pas à ce que la planète vous renvoie l’ascenseur. Elle est un peu radine en la matière.

Bonne action n°3 : Donner aux autres pour nourrir votre propre ego

Ah, les dons. Non, pas les dons financiers, trop faciles ceux-là, on parle ici de dons de soi. Genre, s’investir dans la vie des autres. Faire en sorte que votre journée soit consacrée à améliorer celle d’un autre. Ça sonne noble, héroïque même. Mais il faut le dire, le véritable super-pouvoir dans cette affaire, c’est ce boost d’ego monumental qui vous attend.

Allez, vous le savez, quand vous aidez votre voisin à déménager ses meubles alors que vous aviez prévu une sieste monumentale, vous ne le faites pas seulement pour lui. Non, non. Vous savez pertinemment que vous allez vous coucher le soir avec cette petite voix intérieure qui vous dira : « Wow, t’as vraiment été une bonne personne aujourd’hui, bravo toi ! ». Et là, le bonheur, le vrai, celui qui éclate comme un feu d’artifice au fond de votre cerveau. Vous avez donné, vous avez fait le bien. Et vous ? Vous êtes désormais ce héros du quotidien, même si personne ne vous a applaudi en vous voyant porter ce canapé.

Bonne action n°4 : Le club Barrabino, ou comment observer votre futur tout en se socialisant

Vous n’avez rien à faire ce week-end ? Parfait ! Pourquoi ne pas faire un tour au club Barrabino de Forbach pour une passionnante rencontre intergénérationnelle ? Rien de mieux pour nourrir votre esprit que de passer du temps avec ceux qui ont déjà vu passer cinq générations de smartphones et qui peuvent encore vous parler d’un temps où l’on tricotait nos pulls au lieu de les commander en ligne. Là, vous pourrez observer où nous allons tous finir : entre deux parties de bingo et des discussions sur les prouesses du dentier.

Bonus : vous ressortirez de là avec un profond sentiment de réalisation personnelle (et peut-être quelques conseils sur l’épargne retraite). Ce sera une bonne dose de réalité existentielle : vous verrez bien où la vie vous mène et, qui sait, peut-être que vous repartirez chez vous avec une sagesse nouvelle, ou du moins avec une irrésistible envie de prendre des vitamines.

Parce que donner, c’est bien… mais surtout pour vous

Alors oui, on vous le répète depuis toujours : le bonheur est dans le partage, dans le don, dans l’acte altruiste. Ça tombe bien, vous étiez à court de méthodes pour essayer d’être plus heureux. Mais soyons honnêtes, donner de sa personne, c’est surtout un moyen déguisé d’obtenir votre dose quotidienne de bonne conscience. Une sorte de business où vous échangez un peu de vous-même contre un ticket d’entrée au club des gens bien dans leur peau.

L’univers ? Il s’en fout probablement !
Mais vous, vous aurez l’impression de flotter, de vous élever au-dessus du marasme ambiant.

Et c’est ça, le vrai bonheur, non ? Avoir l’illusion d’être la meilleure version de vous-même ?
Allez, courage, l’humanité n’attend que vous !

Alors oui bien sûr, pourquoi s’embêter à aller vers les autres quand il est tellement plus simple de rester confortablement chez soi, entouré de ses excuses en béton armé ? Après tout, qui a vraiment le temps d’aider quand il faut déjà gérer sa propre vie, ses séries Netflix en retard et son anxiété existentielle ? Et puis, soyons honnêtes, ce n’est pas comme si le monde allait s’effondrer si on continue à pratiquer le sacro-saint « chacun pour soi ». Si chacun reste bien dans sa bulle, ça finira par créer une belle harmonie… Ou un embouteillage monumental d’égoïsmes. Mais hé, au moins, personne ne vous dérangera !

David SCHMIDT