Les bourreaux du bonheur
Quand s’acharner sur les fragiles devient un sport national
Ah, cher lecteur, dans notre monde où les avancées technologiques font passer l’humain pour un dinosaure en voie de disparition, il semble que certaines âmes charitables aient décidé de faire du mal aux autres, une véritable discipline olympique.
Il ne suffit plus de vivre dans une société où la misère est aussi courante que les McDo au coin de la rue ; il faut maintenant en rajouter une couche en s’acharnant sur ceux qui ne sont déjà pas au mieux de leur forme. Un peu comme si, voyant un homme tomber d’un escalier, on se précipitait pour lui donner un coup de pied, « histoire de l’aider à le finir plus vite ».
Il y a quelque chose de profondément fascinant, presque artistique, dans cette capacité qu’ont certaines personnes à identifier les plus vulnérables et à les abattre avec la précision d’un sniper professionnel. Que dis-je, c’est un talent, une vocation même ! Après tout, tout le monde n’a pas cette capacité innée à détecter la moindre fissure dans l’armure de quelqu’un et à la transformer en faille béante. C’est un peu comme si ces bourreaux du bonheur étaient dotés d’un sixième sens pervers, un radar à détresse humaine qui leur permet de cibler les plus fragiles pour les finir d’une phrase assassine.
- Un collègue déprimé à cause d’une rupture amoureuse ? Parfait ! Rien de tel qu’une remarque bien sentie sur son incapacité à garder une relation pour enfoncer le clou.
- Votre ami traverse une période de chômage difficile ? Génial ! Pourquoi ne pas lui rappeler que le marché de l’emploi est « super dynamique » pour les gens « motivés », sous-entendant évidemment qu’il n’en fait pas partie.
Et puis, soyons honnêtes, quel plaisir plus raffiné y a-t-il que de voir quelqu’un sombrer encore plus profondément dans le désespoir après votre intervention bienveillante ?
Ces gens, ce sont les véritables champions du monde de la petitesse d’âme. Là où certains cherchent à tendre la main pour aider, eux, ils préfèrent l’utiliser pour les pousser et si possible, vers le fond du gouffre. Ils se délectent de cette souffrance qu’ils infligent, convaincus que leur « franchise » ou leur « honnêteté » est une forme de service public. Dans leur monde, faire du mal à quelqu’un qui va déjà mal, c’est presque une mission divine, une façon de tester la résistance des autres, tout en évitant soigneusement de regarder leurs propres échecs en face.
Mais ne soyons pas trop durs avec ces tortionnaires du quotidien.
Après tout, il faut bien que quelqu’un mette du piment dans la vie, et quoi de mieux qu’un peu de sel sur les plaies ouvertes des autres ? Sans eux, comment apprécierait-on la vraie bonté, la véritable empathie ? Ils sont un rappel constant que, parfois, le malheur n’arrive pas par accident, mais par la main bienveillante de ceux qui prétendent vous aider. Ça fait juste mal davantage quand c’est des personnes que l’on croyait être des amis !
Alors, chers bourreaux du bonheur, continuez votre noble mission. Soyez fiers de vous, car si un jour vous avez besoin d’un coup de main pour relever la tête, il est fort probable que vous ne trouverez personne pour vous la tendre. Et vous savez quoi ? Vous l’aurez bien mérité.
La prochaine fois que vous croisez une âme en peine, souvenez-vous que vous avez deux choix : l’élever ou l’achever. Mais gardez en tête que celui que vous abattez aujourd’hui pourrait bien être celui qui vous aurait relevé demain.
Et ça, mes chers amis, c’est ce qu’on appelle l’ironie de la vie mêlant l’ironie du sort !
Pourquoi relever quelqu’un quand on peut l’enfoncer ? Le sport favori des âmes sans grandeur !
David SCHMIDT